Le reengineering


Antony COUNET

DESS CONTRÔLE DE GESTION

 

 

 

 

 

 

 

 

MICHAEL HAMMER - JAMES CHAMPY

 

 

 

                                                    LE

REENGINEERING

 

 

 

 

Réinventer l’entreprise

pour une amélioration spectaculaire

 de ses performances

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DUNOD 1993


 

 

 

 

Introduction....................................................

p 1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1.

 

 

La crise actuelle peut être résolue grâce au reengineering.

p 1

 

 

 

 

 

 

1.1.

 

Cette crise qui semble insoluble...............………………...............

p 1

 

 

 

 

 

 

1.2.

 

Reengineering - le chemin du changement...........………………..

p 2

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2.

 

 

Les effets du reengineering..................………………………

p 3

 

 

 

 

 

 

2.1.

 

La reconfiguration des processus opérationnels....………………

p 3

 

 

 

 

 

 

2.2.

 

Un nouveau monde du travail................................……………….

p 5

 

 

 

 

 

 

2.3.

 

Le rôle de levier des technologies de l’information……………...

p 7

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

3.

 

 

La mise en œuvre du reengineering............…………………

p 7

 

 

 

 

 

 

3.1.

 

Les acteurs du reengineering................................………………...

p 7

 

 

 

 

 

 

3.2.

 

La sélection des processus à reconfigurer............………………..

p 9

 

 

 

 

 

 

3.3.

 

Le remodelage des processus.............................………………......

p 10

 

 

 

 

 

 

3.4.

 

Les messages pour motiver au reengineering.......……………….

p 10

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Conclusion : les causes d’échec du         reengineering ne doivent pas constituer un frein au changement.

p 11

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Introduction.

 

L’ouvrage dont nous allons effectuer la synthèse remet en cause toute la pensée traditionnelle sur l’entreprise. Son intérêt réside sur son fondement empirique. Combattre la crise actuelle afin de la vaincre n’est plus une utopie théorique, mais bel et bien une réalité. Peu nombreuses sont les entreprises à y être parvenues, mais leur réussite, décodée et analysée par les auteurs, vaut la découverte de ce livre...

 

 

1. La crise actuelle peut être résolue grâce au reegineering.

 

1.1. Cette crise qui semble insoluble.

 

La récession actuelle qui touche un grand nombre d’entreprises n’est pas seulement conjoncturelle. Elle masque une crise structurelle bien plus grave.

Le monde dans lequel les entreprises fonctionnent a changé au-delà de ce qu’autorisait leur capacité d’ajustement ou d’évolution. Pour retrouver leurs capacités concurrentielles, les sociétés doivent non pas amener leur salariés à travailler davantage mais à travailler autrement.

La plupart des entreprises d’aujourd’hui travaillent autour de l’idée d’Adam Smith développée dans « La richesse des nations » : la division ou la spécialisation de la main d’œuvre et la fragmentation du travail qui en découle. Les salariés ne font jamais le travail en entier ; ils se contentent d’accomplir des tâches parcellaires.

Le système de pouvoir hiérarchique en vigueur dans la plupart des entreprises contemporaines applique les mêmes principes que les compagnies de chemin de fer voici cent cinquante ans. L’administration d’entreprise consiste essentiellement à programmer les gens pour qu’ils se conforment aux procédures établies.

La division du travail intellectuel, parallèle à celle du travail manuel, subsiste aujourd’hui ; on la doit essentiellement à Alfred Sloan chez General Motors au début du siècle. Les cadres du siège n’ont pas besoin de compétences particulières en production. Ils se contentent d’examiner des chiffres.

Subsiste aujourd’hui le management issu des Etats-Unis entre la fin de la seconde guerre mondiale et les années 60, période de forte expansion économique. Grâce à de savants travaux de planification, les cadres supérieurs déterminent les métiers que leur entreprise devrait exercer, la quantité de capitaux qu’il faudrait consacrer à chacun d’eux et la rentabilité réclamée par la société mère aux responsables opérationnels des différentes activités.

 

Le problème est qu’aujourd’hui, on ne peut plus compter sur un cycle économique prévisible - prospérité puis récession suivie d’une prospérité retrouvée. Trois forces, « les  trois C », agissant à la fois ensemble et séparément, poussent les entreprises de plus en plus loin sur un terrain inconnu qui inquiètent la plupart de leurs cadres et dirigeants : ce sont les Clients, la Concurrence et le Changement.

 

Les clients prennent le pouvoir.

 

Le marché de masse s’est brisé ; le client a le choix.

Chaque client - consommateur ou entreprise - demande à être traité individuellement. Il attend des produits adaptés à ses besoins, des délais de livraison adaptés à ses projets industriels ou à ses heures de travail et des conditions de paiement adaptées à ses moyens.

En bref, au lieu des marchés de masse en expansion des années 50, 60, et 70, les entreprises ont en face d’elles des clients - entreprises ou particuliers - qui savent ce qu’ils veulent, ce qu’ils sont prêts à payer et comment l’obtenir dans les conditions de leur choix. Ils ne sont nullement obligés d’en passer par les sociétés qui n’auraient pas compris et assimilé cette mutation radicale de la relation client-acheteur.

Le pouvoir économique est passé du producteur au consommateur. 

A cela nous pouvons énumérer plusieurs facteurs :

 

La production de masse « plus » - plus la qualité, plus le prix, plus le choix et le service - mise en place par la concurrence japonaise a emballé l’attente du consommateur.

 

Dans le secteur des services, les consommateurs attendent et exigent davantage parce qu’ils savent obtenir davantage. Les bases de données sophistiquées permettent aux fournisseurs de services de connaître les préférences et les exigences des clients, ce qui jette les fondements d’une nouvelle compétitivité.

 

La menace d’une intégration « à rebours » a aussi contribué à faire passer le pouvoir des producteurs à celles de leurs clients. Avec la Publicité Assistée par Ordinateur, par exemple, les entreprises peuvent fort bien faire elles-mêmes des travaux qu’elles avaient l’habitude de confier à des imprimeurs.

 

La position du vendeur est fragilisée car l’acheteur potentiel a accès à nombres d’informations sur tout ce qui est proposé sur le marché.

 

Aujourd’hui chaque client compte. Si l’on perd un client aujourd’hui, il n’y en a pas d’autre pour le remplacer.

 

La concurrence se durcit.

 

Aujourd’hui la concurrence n’est pas seulement plus nombreuse, elle est aussi multiforme.

Avec la libération des échanges, aucun territoire national n’est à l’abris de la concurrence.

Un seul acteur meilleur que les autres est capable d’élever le seuil concurrentiel pour toutes les entreprises du monde.

Toute entreprise installée doit aujourd’hui garder un œil sur les nouvelles entreprises.

Les nouvelles entreprises ne respectent pas les règles. Elles en édictent de nouvelles.

 

Le changement devient incessant.

 

Le changement est devenu constant et omniprésent. Il est la normalité.

De plus, le rythme du changement s’est accéléré. Le cycle de vie des produits et services a donc diminué mais aussi le délai disponible pour en développer et en lancer de nouveaux

Les entreprises doivent exercer une surveillance tous azimuts pour détecter efficacement le changement, mais tel est rarement le cas.

Les changements susceptibles de tuer une entreprise sont ceux auxquels elle ne s’attend pas ; or c’est le cas de la plupart des changements dans l’environnement économique actuel.

 

 

1.2. Reengineering - Le chemin du changement.

 

Le message central de ce livre est le suivant : dans le monde actuel, les emplois voués à une tâche sont dépassés. Il faut rejeter les hypothèses inhérentes au paradigme industriel d’Adam Smith : la division du travail, les économies d’échelle, le contrôle hiérarchique et tous les autres accessoires d’un économie aux premiers stades de son développement.

Les entreprises doivent organiser leur travail autour de processus opérationnels transversaux. C’est l’objet du reengineering.

 

Ainsi nous pouvons définir dès maintenant en quoi consiste le reengineering : c’est une « remise en cause fondamentale et une redéfinition radicale des processus opérationnels pour obtenir des gains spectaculaires dans les performances critiques que constituent aujourd’hui les coûts, la qualité, le service et la rapidité. »

Définissons également un processus opérationnel : c’est une suite d’activités qui à partir d’une ou plusieurs entrées (inputs) produit un résultat (output) représentant une valeur pour le client.

Par exemple, dans le traitement des commandes dans une entreprise, c’est la livraison au client des biens demandés qui constitue la valeur créée par le processus.

Les tâches individuelles participant au processus (la réception du bon de commande, la facturation ...) sont importantes, mais aucune d’elles ne vaut quoi que ce soit aux yeux du client si le processus dans son ensemble ne fonctionne pas - c’est-à-dire s’il n’aboutit pas à la livraison de marchandises.

Aujourd’hui personne n’est responsable des processus. Beaucoup y travaillent, mais il n’y a jamais de véritable responsable. Par exemple il existe très rarement un responsable du développement de nouveaux produits.

Les problèmes d’efficacité des entreprises contemporaine trouvent leur source dans la fragmentation des processus opérationnels.

Dans bien des entreprises, le coût de la main d’œuvre baisse, certes, mais les frais généraux montent sans cesse.

 

Lors d’un reengineering, on commence par déterminer ce qu’une entreprise doit faire avant de dire comment elle doit le faire.

Le reengineering est une réinvention de l’entreprise, et non amélioration, renforcement ou modification de celle-ci. Le reengineering signifie recommencer à zéro.

Il faut engager un reengineering que s’il est nécessaire de frapper un grand coup.

 

 

2. Les effets du reengineering.

 

2.1. La reconfiguration des processus opérationnels.

 

Nous avons conclu précédemment qu’il fallait organiser le travail autour de processus opérationnels transversaux. Mais comment cela se manifeste-t-il concrètement ?

Les auteurs de ce livre ont observé et recensé les caractéristiques communes ou thèmes récurrents des processus opérationnels reconfigurés dans des organisations qui ont entrepris et réussi un reengineering. Les voici :

 

Plusieurs postes de travail sont regroupés en un seul.

 

Une personne, le chargé de cas, est responsable d’un processus de bout en bout. Par exemple, le délégué du service clientèle peut renseigner le client sur le suivi de sa commande.

Si la compétence d’une seule personne ne suffit pas pour prendre en charge le processus entier, une équipe de cas est mise en place.

 

Les décisions sont prises par les salariés.

 

Au lieu d’être séparée du travail effectif, la prise de décision est intégrée au travail ; là où ils devaient consulter leurs responsables hiérarchiques pour obtenir une réponse, les employés prennent maintenant les décisions eux-mêmes. Le reengineering comprime donc également les processus verticalement.

 

 

 

Les étapes du processus suivent un ordre naturel.

 

La succession linéaire des tâches impose un ordre de  priorité artificiel qui ralentit le travail. Avec le reengineering, le travail s’ordonne selon l’ordre nécessaire de succession des tâches. Les différentes étapes d’un processus peuvent ainsi se « chevaucher ».

Par exemple, dans le secteur automobile, habitacle et tableau de bord ne sont plus conçus séparément.

La délinéarisation des processus les accélère de deux façons :

 

1) beaucoup de travaux sont réalisés simultanément.

2) la réduction du délai entre les premières étapes et les dernières, diminue le risque qu’un changement important vienne rendre obsolète le travail déjà accompli ou introduise une incohérence entre les travaux les plus anciens et les plus récents.

 

Les processus ont des versions multiples.

 

Avec le reengineering, c’est la fin de la standardisation. Les processus traditionnels à taille unique sont d’ordinaire assez complexes, puisqu’ils doivent prévoir assez d’exceptions et de procédures spéciales pour traiter les situations les plus diverses.

Un processus multiversion, au contraire, est net et simple, car chaque version n’a besoin de traiter que les cas auxquels elle est destinée. Elle ne connaît ni cas spéciaux ni exceptions.

 

Le travail est réalisé là où c’est le plus logique.

 

Le client d’un processus doit accomplir tout ou partie de celui-ci afin d’éliminer les passages de témoin et les frais généraux, donc de réduire les coûts. Par exemple, il est inutile et coûteux pour un comptable de passer par le service achats afin d’acheter une simple gomme !

 

Les vérifications et contrôles sont réduits.

 

Les processus reconfigurés ne font appel aux contrôles que lorsqu’ils sont économiquement justifiés. Au lieu de vérifier le travail au fur et à mesure de sa réalisation, on y pratique le plus souvent des contrôles groupés ou différés.

 

Les pointages sont allégés.

 

Comme on diminue le nombre de points de contact du processus concerné avec l’extérieur, on réduit le risque d’aboutir à des divergences entre les données obtenues et donc de prévoir opérer des rapprochements.

 

Un gestionnaire de cas constitue un point de contact unique.

 

Le gestionnaire de cas se comporte avec le client comme s’il accomplissait lui-même la totalité du processus. Pour être capable de répondre aux questions des clients et de résoudre leurs problèmes, le gestionnaire de cas doit pouvoir accéder à tous les systèmes d’information utilisés par les personnes qui assurent effectivement le processus, et pouvoir faire appel à elles ou leur poser des questions en cas de besoin.

 

 

 

 

Un fonctionnement hybride, centralisé et décentralisé prévaut.

 

Les technologies de l’information permettent de plus en plus aux entreprises de fonctionner comme si leurs unités étaient pleinement autonomes, tout en conservant les économie d’échelle liées à la centralisation.

Dotés d’ordinateurs portables reliés au siège par modem, les représentant peuvent par exemple accéder immédiatement aux informations centrales. En même temps, les contrôles inclus dans les logiciels qu’ils utilisent pour rédiger les contrats de vente leur interdisent d’avancer des prix déraisonnables ou de spécifier des délais de livraison que l’organisation ne pourrait respecter.

 

2.2. Un nouveau monde du travail.

 

Nous venons de recenser un certain nombre de caractéristiques communes ou thèmes récurrents des processus opérationnels reconfigurés. Mais entreprendre un reengineering n’aboutit pas seulement à la transformation fondamentale des processus opérationnels. Il a des conséquences pour bien d’autres parties et aspects de l’entreprise. Qu’elles sont-elles ?

 

Les unités de travail évoluent - de services fonctionnels en équipes responsables d’un processus.

 

Des équipes responsables de processus - groupes de personnes travaillant ensemble pour gérer un processus entier - s’imposent comme le moyen logique d’organiser les personnes qui font le travail. Elles remplacent l’ancienne organisation par services. En fait, il s’agit de rassembler à nouveau un groupe d’employés artificiellement séparés au nom de l’organisation.

 

Il existe différentes sortes d’équipes de processus :

 

1) L’équipe de cas : un certain nombre de personnes différentes travaillent ensemble pour assurer un travail répétitif, tel que le traitement d’une déclaration de sinistre.

 

2) L’équipe virtuelle :  des personnes ne demeurent ensemble que le temps nécessaire pour accomplir une tâche particulière et ponctuelle. Lorsque le projet s’achève, l’équipe se dissout.

 

3) L’équipe de cas ne comprenant qu’un seul membre, le chargé de cas : une personne suffisamment formée assure la totalité du processus.

 

Les postes de travail évoluent - de tâches simples à un travail multidimentionnel.

 

Les membres d’une équipe de processus partage une responsabilité collective portant sur la réalisation du processus entier. Chacun a au moins une connaissance de base de toutes les étapes du processus. Ils utilisent quotidiennement une gamme de compétences plus large, mais ils doivent voir les choses à plus grande échelle.

 

Les rôles évoluent - de postes contrôlés, vers des postes à responsabilité et autonomes.

 

Les responsables qui confèrent à des équipes la responsabilité de gérer un processus entier doivent aussi leur déléguer le pouvoir de décision nécessaire pour y parvenir. Les équipes de processus se gouvernent elles-mêmes.

 

 

 

 

La préparation à l’exercice d’un métier évolue - de la formation vers l’éducation.

 

A la formation du personnel, d’ordinaire appliquée, doit laisser la place à l’éducation, ou l’embauche de gens éduqués.

La formation accroît l’habileté et la compétence du salarié et lui enseigne le comment d’un travail.

L’éducation accroît sa perspicacité et lui enseigne le pourquoi. L’éducation continue, tout au long de la vie professionnelle devient la norme.

 

Les critères essentiels de rémunération et de mesure des performances passent de l’activité aux résultats.

 

La rémunération dépend essentiellement de la contribution au résultat et de la performance. Avec le reengineering, la performance se mesure à la valeur créée, et la rémunération doit être fixée en conséquence. Finis, la détermination des salaires d’après l’ancienneté ou le rang hiérarchique, la rémunération calculée sur le seul temps de présence, l’octroi d’augmentations au seul motif qu’une année s’est écoulée...

 

Les critères d’avancement évoluent - de la performance à l’aptitude.

 

La récompense normale d’un travail bien fait est une prime et non un avancement. L’avancement à un nouveau poste dans l’organisation dépend de l’aptitude, non de la performance. C’est un changement, pas une récompense.

 

Les valeurs évoluent - du protectionnisme à l’ouverture.

 

 Le reengineering suppose que les salariés aient l’intime conviction qu’ils travaillent pour leurs clients et non pour leur entrepreneur.

 

Les managers évoluent - de superviseurs en animateurs.

 

Les équipes de processus n’ont pas besoin de patron, mais d’entraîneurs. Les équipes sollicitent les conseils des entraîneurs, les entraîneurs aident les équipes à résoudre les problèmes. Ils ne sont pas dans l’action, mais ils en sont assez proches pour assister l’équipe dans son travail.

Les managers doivent renoncer à leur rôle de supervision pour faciliter, mettre en condition, agir en hommes dont le travail est de développer les gens et leurs compétences, de sorte que ces gens soient capables d’accomplir eux-mêmes des processus créateurs de valeur ajoutée.

 

Les organigrammes évoluent - de hiérarchiques, à plats.

 

Avec le reengineering, le travail est organisé autour des processus et des équipes qui les assurent. Si besoin est, les gens communiquent avec n’importe qui. Le contrôle incombe aux personnes qui gèrent le processus. L’organigramme tend donc à être plat, car le travail est réalisé par des équipes d’employé égaux, jouissant d’une grande autonomie, et aidés par des managers peu nombreux.

 

Les dirigeants évoluent - d’arbitres en leaders.

 

La bonne exécution du travail dépend des attitudes et des efforts d’employés responsables : les dirigeants doivent donc agir en leaders, orientant et renforçant par leurs paroles et par leurs actes les valeurs et les convictions des salariés.

Les dirigeants font face à leurs responsabilités en s’assurant que les processus sont conçus de telle sorte que les travailleurs puissent faire le travail nécessaire et soient motivés par les systèmes de management de l’entreprise - les systèmes de mesure des performances et de rémunération.

 

 

2.3. Le rôle de levier des technologies de l’information.

 

Dans le reengineering de l’entreprise, les technologies de l’informations jouent un rôle crucial : elles jouent un rôle de levier essentiel, car elles permettent aux entreprises de reconfigurer leur mode de fonctionnement.

Lorsqu’elles considèrent les technologies de l’information, la plupart des entreprises commettent une erreur fondamentale : elles la voient à travers le prisme de leurs processus existants. « Comment utiliser ces nouvelles possibilités technologiques pour renforcer, harmoniser ou améliorer ce que nous faisons déjà ? » se demandent-elles. « Comment utiliser les technologies pour parvenir à faire des choses que nous ne faisons pas encore ? » devraient-elles plutôt se demander.

Contrairement à l’automatisation, le reengineering est affaire d’innovation.

Voici quelques exemples de technologies pouvant contribuer à un reengineering efficace :

 

Grâce aux bases de données partagées, l’information n’est plus disponible qu’à un seul endroit, mais simultanément partout où l’on en a besoin.

Grâce aux systèmes experts, un généraliste peut faire le travail d’un expert.

Grâce aux réseaux de télécommunications, les entreprises peuvent bénéficier simultanément des avantages de la centralisation et de ceux de la décentralisation.

Grâce aux outils d’aide à la décision, chacun peut prendre des décisions à son niveau, sans remonter toute la ligne hiérarchique.

Grâce à la radio-transmission et aux ordinateurs portables, le personnel de terrain peut expédier et recevoir des informations où qu’il se trouve.

 

Les entreprises qui parviennent le mieux à détecter  et à exploiter le potentiel des nouvelles technologies bénéficieront d’un avantage permanent et croissant sur leurs concurrents.

Mais attention, une technologie n’est plus nouvelle lorsque l’on peut l’acheter.

 

 

3. La mise en œuvre du reengineering.

 

3.1. Les acteurs du reengineering.

 

Ce ne sont pas les entreprises qui reconfigurent les processus : ce sont les hommes. Voyons dès à présent le choix et l’organisation des acteurs qui mettent en œuvre le reengineering :

 

Le leader.

 

Le leader est le cadre dirigeant qui autorise et motive l’ensemble de l’effort du reengineering.

Le rôle essentiel du leader est d’agir en visionnaire et de motiver le personnel.

Le leader n’est pas quelqu’un qui fait faire aux autres ce qu’il veut mais quelqu’un qui leur fait vouloir ce qu’il veut.

 

Dans cette optique, il doit adresser des signaux, messages explicites concernant le reengineering, sa signification, ses raisons, ses moyens, ses exigences. Prononcer des discours ne suffit pas à faire passer le moindre message.

Le leader doit également produire des symboles, actes accomplis pour renforcer le contenu des signaux, pour démontrer que ses actes sont en accord avec ses paroles : muter les cadres qui s’opposent au reengineering, affecter les meilleurs éléments de l’entreprise au reengineering ...

Le leader doit aussi utiliser les systèmes pour renforcer les messages du reengineering. Ces systèmes doivent mesurer et récompenser la performance des gens de façon à les inciter à entreprendre un changement majeur. Les systèmes de gestion doivent récompenser et non punir ceux qui échouent en testant de bonnes idées.

Dans le reengineering, le rôle du leader est capital.

 

Le responsable du processus.

 

Le responsable du processus est le manager responsable d’un processus spécifique et de l’effort de reengineering auquel il donne lieu.

Son travail n’est pas de réaliser le reengineering, mais de s’assurer qu’il se réalise. Il doit former l’équipe de reengineering et faire en sorte qu’elle puisse accomplir son travail. Il obtient les ressources dont elle a besoin, gère les problèmes administratifs et s’efforce d’obtenir la coopération des autres managers responsables de groupes fonctionnels impliqués dans le processus.

Le responsable de processus est aussi celui qui motive, inspire et conseille son équipe.

Plus tard, c’est lui qui veillera à son bon fonctionnement.

 

L’équipe de reengineering.

 

L’équipe de reengineering est le groupe de personne qui se consacrent au reengineering d’un processus particulier, qui établissent le diagnostic du processus existant et qui développent son remodelage.

Une équipe comprend de 5 à 10 personnes, initiées et néophytes, par processus.

 

Les initiés sont ceux qui travaillent déjà au sein du processus concerné. Ils doivent connaître les ficelles du métier, mais pas au point  de croire que les vieux processus vont de soi. Leur atout le plus important, leur crédibilité auprès de leurs collègues de travail.

 

Mais, pour changer vraiment, l’équipe doit aussi comprendre un élément perturbateur, c’est le rôle des néophytes.

Ne travaillant pas dans le processus soumis au reengineering, les néophytes apportent une plus grande objectivité et une perspective différente. Leur travail au sein de l’équipe est de faire des vagues.

Un rapport de deux ou trois initiés pour un néophyte est convenable.

 

Les équipes de reengineering doivent être largement autodirigées. Le principal critère de mesure et de récompense de leurs performances doit être l’état d’avancement de leurs travaux. De plus, la réussite individuelle de ses membres devrait être mesurée en grande partie d’après la performance de l’équipe.

Elles n’ont pas de chef officiel, mais un meneur qui a pour rôle de permettre aux membres du groupe de faire leur travail.

Les membres doivent au moins consacrer les trois quarts de leur temps à l’effort de reengineering.

Normalement ils vivront eux-mêmes le résultat de leur travail.

 

Le comité de pilotage.

 

Le comité de pilotage est l’ensemble des cadres supérieurs qui mettent au point la stratégie globale de reengineering de l’organisation et qui pilotent son avancement.

Facultatif, il est présidé par le leader.

Les membres du comité se font exposer et résolvent les conflits entre responsables de processus.

Tout à la fois cour d’appel, société de secours mutuel et parlement, le comité de pilotage peut contribuer grandement à la réussite d’un programme de reengineering à  grande échelle.

 

Le capitaine de reengineering.

 

Le capitaine de reengineering est la personne responsable de la création des techniques et outils de reengineering de l’entreprise, et garante des synergies à assurer entre ses différents projets.

Il a deux fonctions principales : il aide et soutient tous les responsables de processus et toutes les équipes du reengineering. Et il coordonne tous les chantiers du reengineering en cours.

Il peut aider à choisir les membres des équipes de reengineering.

Il vérifie que les responsables de processus  restent sur la bonne voie tout au long du projet.

Il doit également anticiper et régler les problèmes d’infrastructure avant même qu’ils ne se posent, tel l’informatique.

Attention à l’excès d’autoritarisme, le pouvoir doit demeurer entre les mains du leader et du responsable du processus.

 

Dans l’idéal, la relation entre ces rôles est la suivante : le leader désigne un responsable du processus qui constitue une équipe de reengineering chargée de traiter un processus avec l’assistance du capitaine de reengineering sous les auspices du comité de pilotage.

 

 

3..2. La sélection des processus à reconfigurer.

 

Nous venons de voir quels étaient les acteurs du reengineering. Maintenant voyons ce dont ils s’occupent.

Le reengineering a pour objectif le remodelage des processus. Une entreprise ne reconfigure pas sa direction des ventes ou son département de production, elle reconfigure le travail accompli par les employés de ces services.

 

Les processus sont ce que les entreprises font, par exemples :

 

Le développement de produit : du concept au prototype.

Les ventes : du prospect à la prise de commande.

Le service : de la demande à la solution.

 

Les entreprises peuvent cartographier leurs processus pour représenter les flux de travail réalisé. Une fois la carte établie, quel sont les candidats au reengineering, et dans quel ordre les traiter ?

 

Le choix des processus à reconfigurer.

 

Le choix des processus à reconfigurer  s’opère sur trois critères : dysfonctionnement, impact et faisabilité.

 

Les processus qui posent le plus de problèmes sont prioritaires.

L’importance du processus, ou son impact sur le client extérieur, est le second critère à considérer pour choisir les processus à reconfigurer dans une entreprise et l’ordre dans lequel on avancera.

Le troisième critère, la faisabilité, dépend d’une série de facteurs qui déterminent la probabilité de réussite d’une entreprise de reengineering. Plus il est vaste et coûteux, plus la difficulté sera grande.

 

 

 

 

Comprendre les processus.

 

Avant de pouvoir commencer son travail de remodelage, l’équipe de reengineering doit savoir un certain nombre de choses sur le processus existant : ce qu’il fait, s’il marche bien ou mal et ce qui contribue le plus à déterminer sa performance.

 

Pour comprendre un processus, l’équipe de reengineering commencera de préférence par se mettre à la place des clients. Pour se renseigner sur ce que font les clients il vaut mieux les regarder le faire ou, mieux encore, le faire soi-même.

 

L’étape suivante consiste à se représenter ce que le processus fournit actuellement - à comprendre le processus actuel lui-même, le quoi et le pourquoi de ce processus. Plus les membres de l’équipe maîtriseront les véritables objectifs du processus, mieux ils réussiront son remodelage.

 

 

3.3. Le remodelage des processus.

 

Après avoir identifié les processus à remodeler, se pose la question de la manière de l’effectuer :

 

Lors d’une première réunion, la session de remodelage ou « redesign » , l’équipe de reengineering fait jaillir de grandes idées selon trois techniques possibles :

 

Appliquer avec audace un ou plusieurs principes du reengineering : il faut essayer de pousser à l’extrême le principe selon lequel il vaut mieux organiser le travail en fonction de son résultat plutôt qu’en fonction des tâches (ou le principe selon lequel le nombre de personnes qui contribuent au fonctionnement d’un processus doit être aussi faible que possible).

Rechercher et détruire les idées reçues : par exemple il faut détruire l’idée reçue suivante : si une entreprise possède des centres de distribution régionaux, c’est probablement qu’elle pense que les centres régionaux assurent un meilleur service qu’une distribution centralisée.

S’efforcer d’utiliser les technologies dans un esprit créatif : voyez le potentiel des nouvelles technologies, puis déterminez si cela vous aide à repenser les processus.

 

Voici huit leçons tirées des expériences.

 

1. il n’est pas nécessaire d’être un expert pour remodeler un processus.

2. être un néophyte est un atout.

3. il faut se défaire des idées reçues.

4. il est important de voir les choses du point de vue des clients.

5. le reengineering est de préférence un travail d’équipe.

6. il n’est pas nécessaire d’en savoir beaucoup sur les processus actuels.

7. il n’est pas difficile d’avoir de grandes idées.

8. le reengineering n’est pas forcément quelque chose de pénible.

 

 

3.4. Les messages pour motiver au reengineering.

 

Demeure le défi énorme qui consiste à convaincre l’ensemble des salariés de la nécessité du reengineering. Deux messages sont à faire passer : « voilà où en est aujourd’hui notre entreprise et pourquoi elle ne peut en rester là » et « voilà ce qu’il nous faut devenir en tant qu’entreprise ».

Pour exprimer et faire connaître ces messages essentiels, les entreprises utilisent deux documents : « l’appel à l’action » et « la définition de la vision ».

 

L’appel à l’action doit comprendre le contexte professionnel, le problème opérationnel, les demandes du marché, le diagnostic et enfin le prix ou plutôt le coût de l’inaction.

 

Une vision forte contient trois éléments : elle se concentre sur le métier de l’entreprise, elle comprend des objectifs mesurables et des instruments de mesure, enfin, elle est vraiment puissante, elle transforme les bases de la concurrence dans le secteur. Par exemple, l’entreprise Federal Express des Etats-Unis a créé la vision suivante : « Nous livrerons des colis le lendemain avant 10h30 ».

 

 

Conclusion : les causes d’échec du reengineering ne doivent pas constituer un frein au changement.

 

Réussir un reengineering est difficile. Voici les causes d’échec du reengineering, les plus habituelles :

 

Tenter d’améliorer un processus au lieu de le changer, ne pas se concentrer sur les processus opérationnels, s’intéresser uniquement au remodelage des processus (en fait il faut « refaire » la société), négliger les valeurs et les convictions des individus, accepter un compromis sur des résultats mineurs, abandonner trop vite, fixer des limites à priori à la définition du problème et à l’envergure du reengineering (le reengineering débute en effet par la définition des objectifs à atteindre et non de la façon d’atteindre ces objectifs), laisser la culture d’entreprise et les attitudes des dirigeants empêcher le démarrage du reengineering, essayer de le déclencher à partir de la base (l’ampleur de vue nécessaire au reengineering manque aux gens proches de la base et tout processus opérationnel traverse inévitablement les frontières organisationnelles, de sorte qu’aucun cadre moyen n’aura assez d’autorité pour en réclamer la modification), désigner pour conduire le reengineering quelqu’un qui ne le comprend pas, rechigner sur les ressources dévolues au reengineering, le noyer dans un trop plein d’initiatives (les entreprises qui se refusent à placer le reengineering au sommet de leurs préoccupations feraient mieux d’y renoncer totalement), dissiper l’énergie de l’entreprise sur une multitude de projets de reengineering, tenter un reengineering alors que le PDG est à deux doigts de la retraite, être incapable de faire la différence entre le reengineering et les autres programmes d’amélioration, s’attacher exclusivement aux concepts (il faut dépasser la phase de l’idée), tenter un reengineering sans déplaire à quiconque, battre en retraite face aux résistances soulevées par le reengineering, faire traîner l’effort en longueur (un an au plus).

 

En dépit des risques d’échec, les auteurs de ce livre, Michael Hammer et James Champy,  demeurent encouragés par le nombre de succès du reengineering. Ils prennent ainsi comme exemples les entreprises américaines Hallmark (cartes de voeux ...), Taco Bell (fast-food), DRG (vente d’assurances par marketing direct) et Bell Atlantic (télécommunications), entreprises qui ont réussi leur reengineering.

Nous vous conseillons de découvrir leurs histoires dans les derniers chapitres de leur ouvrage. Elles illustrent parfaitement l’idée qu’il faut remettre en cause le fonctionnement de l’entreprise traditionnelle.

 

En la reconfigurant transversalement, le reengineering permet en effet de réaliser d’importants gains sur les coûts, les délais, le service et la qualité, et lui développe ainsi un nouvel avantage concurrentiel.

Cet ouvrage nous en apporte la preuve ; demeure le plus difficile, le mettre en œuvre !